Un Aiglon de 38 ans a comparu devant le tribunal correctionnel d’Alençon (Orne), jeudi 2 mai pour pratique commerciale trompeuse, blanchiment, exécution d’un travail dissimulé, publicité tendant à favoriser volontairement le travail dissimulé, abus de confiance et recel. Des faits commis entre 2015 et 2018 à Sées, La Ferrière-au-Doyen, Tourouvre et Orgerus (Yvelines).
Signalement des Gilets jaunes
L’homme avait créé une entreprise multi-services (de paysagiste, plaquiste, plombier, maçon) après « une journée de formation de création d’entreprise » et une déclaration d’auto-entrepreneur sur internet. Il avait sérigraphié son camion du nom de sa création « sans qu’apparaisse de numéro de Siret », distribué des cartes de visite et apposé des panneaux sur les chantiers avec le même manquement.
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Il délivrait également des devis « avec de fausses prestations » et acceptait des acomptes sans terminer les travaux. Il encaissait les chèques de ses clients sur le compte de sa compagne d’alors et retirait ces sommes en espèces.
« Au total, ce sont 114 064 € qui ont été encaissés. Cette somme provient d’une activité illégale car issue d’un travail dissimulé ».
Le président ajoute que l’affaire a vu le jour après « des plaintes de personnes qui se plaignaient de votre travail » mais aussi de signalements de « Gilets jaunes auprès des gendarmes, sur les ronds-points ».
Une remorque retrouvée chez lui a été achetée sans carte grise. « Si le propriétaire qui la vend n’a pas la carte grise, c’est qu’il n’est pas le propriétaire ! », lui rappelle le président. Divers objets revendus chez Easy Cash « pour 5 000 € » étaient aussi le produit de vols d’où le recel.
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A la barre, l’Ornais, inconnu des services de l’Urssaf et du registre du commerce mais bénéficiaire du RSA, confie « avoir toujours rêvé d’avoir un camion avec le nom de son entreprise dessus ». Quant au numéro de Siret ? « On m’a dit que ce n’était pas obligatoire ! »
« Il a tout cassé dans la maison ! »
« Vous étiez interdit de chèques, vous effectuiez des retraits en liquide pour payer les fournisseurs, vous ne teniez pas de comptabilité… Vous pensiez vraiment que la situation était viable ? ».
« Plus c’est gros et plus ça passe ! », signale l’avocate de deux parties civiles qui « ont pensé avoir légitimement affaire à quelqu’un en règle dans ses papiers ». Sur un de ses chantiers, « il avait tout cassé dans la maison et ma cliente s’est retrouvée sans salle de bains utilisable, sans toilettes branchées ».
Elle a même dormi sur un matelas car il lui a demandé de ne pas repositionner ses meubles pour ne pas être gêné dans ses travaux.
« Il avait entrepris une relation amoureuse avec elle donc elle savait ses difficultés et lui a fait deux chèques avant de lui donner l’intégralité de son épargne ! Elle a été contrainte de refaire un crédit de 10 000 € alors qu’elle a une situation financière très fragile ».
Sur un autre chantier, c’est la dalle en béton de l’agrandissement de la maison qui « a été réalisée dans des conditions déplorables et présentait de nombreuses contrefaçons », plaide l’avocate non sans signaler que des travaux de reprise ont dû être financés à la suite de l’intervention du prévenu.
« Il est loin d’être idiot » »
« Le prévenu a des difficultés a écrire et lire mais il est a même de profiter de toutes les occasions qui rapportent de l’argent ! », constate la vice-procureure.
Selon elle, le prévenu « est loin d’être idiot car il a fait tout le nécessaire, des devis, des cartes de visite, la sérigraphie de son véhicule, sa pub à droite et à gauche mais ce n’est pas parce qu’on est habile de ses mains qu’on s’invente auto-entrepreneur surtout dans les métiers du bâtiment ! Maçon, ça s’apprend ! Il y a eu 114 000 € détournés donc il y a des victimes. Et il a encaissé des chèques sur des comptes qui ne sont pas les siens, on voit bien que c’est de la magouille ! »
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Un an de prison avec sursis
Et si le prévenu « n’a pas d’antécédents judiciaires », les faits « sont graves », insiste la vice-procureure avant de requérir 18 mois de prison avec sursis et mise à l’épreuve pendant deux ans ainsi que des obligations de travail et d’indemnisation.
L’avocat de la défense a évoqué des failles du site de déclaration des auto-entrepreneurs sur internet avant de noter que son client avait toutefois « conduit correctement des chantiers ».
Le tribunal a finalement condamné l’Ornais de 38 ans à un an de prison avec sursis et mise à l’épreuve pendant deux ans ainsi qu’aux obligations de travail, de soins et d’indemnisation des victimes à hauteur de 52 000 €, tous préjudices confondus.