
Chloé Villa s’est, cette semaine encore, mise dans l’ambiance du livre qu’elle présente…
L’histoire
Six ans après Orgueil et Préjugés, Elizabeth et Darcy coulent des jours paisibles au domaine de Pemberley. Ce bonheur vacille une nuit d’automne : un meurtre impliquant Wickham, le beau-frère d’Elizabeth, s’est déroulé à Pemberley…
La critique
C’est une vérité universellement reconnue que Jane Austen est une source d’inspiration intarissable pour de nombreux auteurs. Beaucoup se sont mis au défi d’écrire des ouvrages inspirés de son œuvre, parfois avec mérite, d’autres sans grand talent, souvent d’une façon totalement oubliable.
De tous les livres d’Austen, celui à avoir connu le plus de variations n’est autre qu’Orgueil et Préjugés dont notre roman du jour, La mort s’invite à Pemberley de P.D. James, ambitionne d’être la suite.
James compte parmi les écrivains britanniques les plus appréciés et prolifiques de l’histoire du polar. Elle est aussi une immense fan d’Austen et a donc abordé, malgré sa carrière foisonnante, son sujet avec beaucoup de modestie.
Cette suite criminelle n’est pas dépourvue d’atouts, bien au contraire. La plume est soignée à l’extrême ; les descriptions de Pemberley et des alentours, ainsi que la mythologie autour des Darcy, sont plus que plaisantes à découvrir ; le tout est doté d’une critique frontale de la société de l’époque, doublée d’un parallèle entre les événements historiques dramatiques qui ébranlent l’Europe et le quotidien privilégié sur la propriété.
Mais, reconnaissons-le : plus que tout cela, il y a surtout la joie intacte de redécouvrir Elizabeth et Darcy à présent qu’ils sont mariés, heureux et parents ainsi que de retrouver la pléthore de personnages secondaires qui s’illustraient à leurs côtés. Sans oublier le plaisir (un peu sadomasochiste), de voir le ravissant démon qu’est Wickham exécuter son retour en force dans l’intrigue, aussi séducteur, charismatique et retors que l’on pouvait s’y attendre.
Pourtant, La mort s’invite à Pemberley aurait de quoi décourager plus d’un lecteur : l’intrigue manque cruellement de rythme, si bien que l’on frôle l’ennui plus d’une fois. Malgré le potentiel évident de cette suite, on peut regretter cette lenteur, ce classicisme poussif où s’engonce l’histoire.
Beaucoup plus impardonnable : le manque de causticité. En effet, l’auteure oublie régulièrement l’ironie mordante, l’impertinence à peine voilée de son illustre modèle.
La mort s’invite à Pemberley n’est pas un échec, pas plus qu’une réussite – il s’avère tout simplement correct. Il est du reste fort à parier que les fans de Jane Austen lui seront sans doute plutôt hostiles et que les inconditionnels de P.D James ne retrouveront guère la tension habituelle de ses ouvrages… Il est donc à réserver aux amateurs de polar conventionnel.
La mort s’invite à Pemberley de P.D. James aux Éditions Fayard. 380 pages. 20 €. Également disponible aux Éditions Le Livre de Poche. 408 pages. 7,60 €.